Les enseignants constituent la ressource la plus significative et la plus précieuse des établissements scolaires. Les enseignants sont également les acteurs essentiels du changement, c’est-à-dire du développement économique et social dans tous les pays à travers le monde. La politique éducative des années 1960 à 1980, était appréciable du fait de la qualité de l’enseignement, des infrastructures, mais surtout des conditions salariales qui permettaient de subvenir à tous les besoins importants, de tous ordres, de la vie. De nombreux jeunes rêvaient d’être enseignants car ces derniers étaient considérés et respectés dans la communauté.
La récession économique des décennies 1980 et1990, avec la mise en œuvre des programmes d’ajustement structurel, imposés par la Banque mondiale et le Fonds monétaire international, ont contraint notre pays à recruter des enseignants sans formation initiale, désignés selon des vocables différents (enseignants volontaires, enseignants communautaires, enseignants contractuels etc.). On distingue désormais, au sein de la profession enseignante deux statuts professionnels principaux : le statut d’enseignant titulaire, fonctionnaire de l’État, et celui d’enseignant non-titulaire ou enseignant contractuel, recruté sous contrat par le ministère ou ses autorités décentralisées. Les enseignants contractuels représentent plus des trois quarts des effectifs globaux du corps enseignant et ont une rémunération nettement plus faible, pour le même travail effectué que les enseignants dits titulaires. Cependant il faut aussi noter qu’en termes de compétences, les enseignants contractuels sont généralement moins qualifiés que leurs collègues titulaires. Mais la différence criarde de revenu, a des effets pervers comme l’augmentation des taux d’absentéisme enseignants chez les enseignants contractuels et le recours à d’autres activités professionnelles pour compléter leurs revenus et même le départ définitif de la profession, vers un autre emploi mieux rémunéré et l’abandon de la craie. Aussi, le fait de recruter « n’importe quel diplômé » pour occuper, en classe, la place d’un enseignant formé, dévalorise le statut social de de l’enseignant qui n’apparaît plus du tout comme un « professionnel ». Cette dégradation ou précarisation de la profession enseignante et l’impunité face aux agressions expliquent la vulnérabilité et l’augmentation des violences perpétrées par des élèves et des parents d’élèves sur des enseignants dans les établissements. De ce fait, l’enseignement devient un pis-aller pour beaucoup de jeunes diplômés, une solution de remplacement, en attendant un lendemain meilleur, c’est à dire d’obtenir un autre travail qui rapportera plus de gains et d’avantages financiers.
Les principales raisons évoquées qui seraient à l’origine des violences dérivent de mauvaises notes ou appréciations à l’issue d’évaluations (devoirs, interrogations, examens, etc.) ; des sanctions ou des manières de dire et de faire des enseignants pour rétablir l’ordre au sein de la classe ou de motifs particuliers liés à la vie juvénile, à l’adolescence ou même à la consommation de stupéfiants. Certains élèves sont en réaction par rapport aux règles de discipline de l’établissement, aux humiliations ou au manque de respect de certains enseignants à leurs endroits, ou encore de tensions au sein de la famille, de l’entourage, ou d’autres conflits …
L’Etat doit prendre toutes ses responsabilités par des textes règlementaires qui permettent de réprimer tout mauvais comportement à l’école, particulièrement d’élèves fautifs vis-à-vis de leurs enseignants et mieux gérer la discipline. Autant l’enseignant n’a pas le droit de porter la main sur un enfant, on ne doit plus accepter que des élèves agressent impunément leurs enseignants. L’Etat doit aussi protéger les enseignants comme tous les fonctionnaires par l’application des dispositions déjà prévues dans le statut de la fonction publique à travers la protection fonctionnelle, notamment :
Le Chapitre IV : Des droits, garanties et obligations communs aux agents de la Fonction Publique :
- Article 17 : L’agent de la Fonction Publique a droit, conformément aux règles fixées par la loi pénale et les lois spéciales à une protection contre les menaces, attaques, outrages, injures ou diffamations dont il peut être l’objet dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions. L’Etat ou son démembrement intéressé est tenu d’assurer cette protection et de réparer, le cas échéant le préjudice qui en est résulté. L’Etat ou son démembrement tenu dans les conditions prévues à l’alinéa précédent est subrogé dans les droits de la victime pour obtenir des auteurs de menaces ou attaques, restitution des sommes versées à son agent. Il dispose en outre, aux mêmes fins, d’une action directe qu’il peut exercer au besoin par voie de constitution de partie civile devant la juridiction pénale.
Et le Chapitre VIII : De la rémunération et des avantages :
- Article 39 : Les agents de la Fonction Publique bénéficient d’une protection sociale en matière de risques professionnels, des prestations familiales, de pensions de retraite et de soins de santé dans les conditions fixées par la loi.
Face à l’intensification des violences envers les enseignants, l’État doit prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir à ses « employés » la jouissance inaliénable des droits inscrits dans le statut général de la fonction publique.
L’école est un bien commun à tous les nigériens pour forger l’Homme de demain, c’est-à-dire des citoyens respectueux des droits, devoirs, de la démocratie républicaine et de toutes les valeurs nationales et universelles reconnues de l’Homme. L’amélioration du système scolaire et de la qualité de l’éducation, nécessite :
- Une bonne gouvernance du système et une gestion impartiale et apolitique notamment concernant les nominations aux différents postes de responsabilités, basée sur les compétences et respectant les catégories et grades comme dans les corps militaires.
- La revalorisation des salaires et du statut des enseignants.
- La lutte contre l’impunité à l’école
Une sensibilisation sur la valorisation de l’enseignement comme une profession prestigieuse, doit être menée pour accroitre le respect dû aux enseignants et pour attirer comme par le passé de nombreux jeunes vers ce noble métier indispensable au développement du pays.